Par Kathy Guilhempey, chargée de projets en communication pour Proche en tout temps.
Dans un hôpital québécois, une personne qui vient de recevoir un diagnostic de cancer est généralement invitée à exprimer ses émotions. Si sa manière de réagir est de frapper la main contre un mur, sans autre violence, on la comprendra, et une équipe sera là pour la soutenir au besoin. En revanche, une personne qui poserait le même geste en recevant un diagnostic de maladie mentale sera plutôt invitée à se calmer rapidement, sans quoi elle risquera la contention, physique ou chimique. J’ai repris cet exemple du conférencier Luc Vigneault pour aborder un phénomène familier mais pourtant méconnu : la stigmatisation.
La stigmatisation débute lorsqu’on isole une caractéristique d’une personne pour réduire celle‑ci à ce seul aspect. Aux yeux de Serge (nom fictif), qui pose ce regard réducteur, son voisin qui vit avec la schizophrénie devient à part entière « un schizophrène ». La notion d’être humain dans toute sa complexité s’efface derrière une étiquette. Serge va même tendre à accentuer encore cette catégorisation en notant inconsciemment tout ce qui le différencie d’un « schizophrène ». Par conséquent, un aveuglement se créera lorsque la mince frontière entre être différent et être dans le tort sera franchie. Par exemple, les personnes vivant avec la schizophrénie peuvent connaître un certain isolement social, que Serge pourra interpréter comme de la lâcheté. L’étape suivante aura tôt fait d’être atteinte : pour Serge, « tous les schizophrènes sont des lâches ». La stigmatisation s’est ancrée.
Les répercussions de la stigmatisation font mal et ses effets perdurent bien après que le traumatisme a eu lieu, encore plus si la personne a vécu de la stigmatisation à plusieurs reprises ou sur une longue période. Ou si elle a eu lieu à plus d’un titre, comme cela peut être le cas pour les aînés (stigmate du vieillissement, image du « vieux ») qui vivent avec un problème de santé mentale (stigmate de la maladie mentale, image du « fou »). Une des conséquences possibles est l’autostigmatisation, qui consiste, pour la personne concernée, à intégrer le discours négatif qui la vise. Elle se met à y croire elle-même.
La stigmatisation est souvent inconsciente. Effectivement, pour poursuivre notre exemple, les différentes pensées de Serge sont conscientes, mais le lien qui se créé entre elles pour produire la stigmatisation ne l’est pas forcément. Et c’est pour cela qu’il est difficile de lutter contre la stigmatisation : il faut rendre conscient un processus inconscient et déployer un effort pour le déconstruire.
Y a-t-il des pistes de solution pour éviter de contribuer à stigmatiser les personnes aînées vivant avec un problème de santé mentale ? Oui. D’abord, s’informer sur leur maladie pour se baser sur des faits et non sur des idées reçues, tout en misant sur le rétablissement de leur santé mentale – qui est possible à tout âge –, plutôt que sur la maladie elle-même. Ensuite, inclure ces personnes, tenir compte de leurs idées, les écouter comme on le ferait avec n’importe qui d’autre. En somme, les considérer avant tout pour ce qu’elles sont, c’est-à-dire, tout simplement, des êtres humains ayant des qualités, des forces et du potentiel.
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